Pour conclure la quinzaine consacrée à la « Résistance » en ce 139ème jeudi en poésie chez Enriqueta pour les Croqueurs de mots, j’ai choisi un poème de Miguel_Hernandez, héros de la résistance espagnole. J’avais étudié ce poème au lycée et ne rappelle que les strophes que je peux encore citer de mémoire aujourd’hui. J’ai traduit la première moi-même, et copié sur le net la traduction des deux autres.
EL HERIDO
Por los campos luchados se extienden los heridos.
Y de aquella extensión de cuerpos luchadores
salta un trigal de chorros calientes, extendidos
en roncos surtidores.
…..
Para la libertad sangro, lucho, pervivo.
Para la libertad, mis ojos y mis manos,
como un árbol carnal, generoso y cautivo,
doy a los cirujanos.
…..
Retoñarán aladas de savia sin otoño
reliquias de mi cuerpo que pierdo en cada herida.
Porque soy como el árbol talado, que retoño:
porque aún tengo la vida.
Miguel Hernandez : El Herido ( 1938-39)
L’HOMME BLESSE
Sur les lieux de combat sont éparpillés les blessés
Et de cette étendue de corps déchirés
Résulte un champ de projections chaudes, répandues
En jets rauques.
….
Pour la liberté, je saigne, je lutte, je survis.
Pour la liberté, mes yeux et mes mains,
comme un arbre charnel, généreux et captif,
je donne aux chirurgiens (j'aurais plutôt traduit bourreaux, bouchers)
….
Des ailes de sève sans automne bourgeonneront,
reliques de mon corps qu'à chaque blessure je perds.
Parce que je suis [comme] l'arbre écorché, je bourgeonne :
parce que, encore et toujours, j'aime la vie.
Miguel Hernandez : L’homme blessé (1938-39)
Je justifie mon choix par trois raisons :
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D’une part, Miguel Hernandez comme Federico Garcia Lorca sont deux immenses figures de la résistance espagnole, durant la guerre civile entre 1936 et 1939.
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D’autre part, mon professeur d’espagnol de l’époque, Mme N Guyen, m’avait beaucoup soutenue quand je flanchais devant la médiocrité de mes résultats scolaires, me poussant à entreprendre des études supérieures.
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Enfin, cette anecdote. Un soir, à Marbella, au cours d’une soirée où j’avais un peu abusé de sangria, j’avais déclamé : « Para la libertad, sangro, lucho, pervivo… » A table, mes amis espagnols s’étaient tus d’un coup puis avaient crié : Miguel Hernandez ! en m’applaudissant. C’était un moment fort que je n'ai pas oublié.