1 février 2016
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10:00
Il est entré dans l’officine d’un pas lent et hésitant, en appui sur une canne, un feutre lui couvrait le crâne. Sa voix chevrotait mais ses yeux noirs pétillaient, il savait parfaitement ce qu’il voulait : un médicament pour le transit. J’ai annoncé des noms : DULCOLAX, MICROLAX, PURSENNIDE, MODANE etc…
« Oui c’est ça » il a dit, et puis « mais non, cherchez dans votre ordinateur. »
J’ai demandé s’il voulait des suppositoires ou des comprimés. Il a dit : « des comprimés marron » puis a affirmé « MICROLAX, c’est ce que je veux !
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Ce sont des suppositoires, monsieur.
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Eh bien, je ne sais pas moi. La dernière fois, vous aviez trouvé tout de suite et si je reviens chez vous, c’est pour ça.
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La dernière fois, vous deviez avoir une référence à nous montrer !
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Oui et alors ! Vous n’avez qu’à chercher dans votre ordinateur! »
Il s’entêtait, faisait les cent pas le long du comptoir, levait les bras, tapait le sol avec sa canne. Ses joues rosissaient, sa bouche édentée frémissait de colère. Alors j’ai tourné l’écran vers lui, ai fait défiler les photos de tous les laxatifs connus, il niait chaque fois : « Non, ce n’est pas ça ! ». J’étais à bout d’arguments, je l’ai laissé repartir… Bredouille. Arrivé à la porte, me tournant le dos et secouant la main avec impatience, il a déclaré : « Franchement à notre époque, je ne comprends pas que vous aussi, vous ne soyez pas des ordinateurs !»
Nous nous regardées ma préparatrice et moi, ce petit intermède psychédélique était peut-être une caméra cachée, qui sait !