Cette fois, c’est d’une pièce de théâtre dont j’ai envie de parler. Ce n’est pas un choix personnel au départ, j’avais des invitations pour ce spectacle. Marie Christine Barrault seule en scène durant deux heures au théâtre Daunou, à Paris. J’avais peur de bailler aux corneilles, de me trémousser sur mon siège et de soupirer en fermant les yeux. Mais c’était sans compter sur le texte de Françoise Chandernagor, une adaptation de son livre « L’allée du Roi ». La vie passionnante de Mme de Maintenon a de quoi retenir l’attention à elle seule : le siècle de Louis XIV, ses fastes, ses femmes légères et ses gens d’esprit. Le décor est épuré et ingénieux, la statue du Grand Roi à cheval, est de profil et nous tourne le dos. On ne perçoit que les boucles de sa perruque, son épée et la croupe de son cheval. Comme pour rehausser sa majesté et signifier son dédain de nous, petit peuple. Au début du spectacle il est recouvert d’un drap. La dame de compagnie de la Montespan le découvre au fur et à mesure que grandit sa passion pour le souverain.
Et il y a Marie Christine Barrault. Une immense actrice qui réussit une performance extraordinaire. Elle est Françoise d'Aubigné puis la veuve Scarron, puis la favorite, l’épouse cachée et enfin la veuve vieillissante. Elle est enfant, adolescente, adulte, femme. C’est dans les gestes, les mots, la voix. La silhouette un peu lourde prise dans une robe longue et noire, mincit par le truchement des costumes enfilés puis retirés, des postures adoptées. Le visage est expressif, il brille, rougit, pâlit, s’éclaire, se voile, raidit, s’éteint. La Barrault devient les personnages que côtoie la Maintenon. Tour à tour, religieuse, tante sans scrupules, libertin, femme galante, dame de la cour, favorite et roi Soleil, elle affiche une détermination sans faille. Elle évolue avec humour, grâce et esprit au milieu de ses fantômes. Au déclin d’une vie fastueuse, Mme de Maintenant reste pétillante et Marie Christine Barrault sait nous envelopper dans ses bulles.
Tout ça pour dire qu’on ne parle pas assez des pièces de théâtre géniales qui se montent à Paris, nous croyons à tort que tel ou tel spectacle va nous déplaire et les invitations sont un bon moyen de nous attraper au tournant. Il faut reconnaître que le théâtre reste un loisir onéreux et permettre aux entreprises d’en faciliter l’accès aux employés, est une très bonne initiative. Allez voir Marie Christine Barrault dans « L’allée du Roi », si vous le pouvez ! A Paris le spectacle est bientôt terminé, mais s’il passe en province, ne le loupez pas.
Françoise d'Aubigné, marquise de Maintenon