Rentrer, pour moi, c’est reprendre le collier. Les premiers jours sont éprouvants, Se remettre dans le bain, les clients, les collègues, la paperasse. Le stress, la sensation de perdre le bénéfice des vacances. Et doucement, le rythme de croisière s’installe.
Mes enfants sont grands, en stage professionnel tous les deux. Alors plus de cartable, de liste, de cahier, de bousculade et de file d’attente à la caisse du supermarché. Plus de larmes, de goûter à préparer, de réunion parents instituteur ou professeurs. Je ne peux pas dire que ça me manque, au contraire, finies les corvées. Et pourtant c’étaient des moments de complicité, de responsabilisation. Des doutes à lever, de l’angoisse à évacuer. Des câlins, des bisous, retrouver les autres mamans copines, bavarder autour d’un café. Des résolutions, des plannings, déterminer à quoi sera consacré le mercredi. Flûte ou piano, karaté ou judo, farniente ?
Mais cette année rentrer avait une saveur particulière car durant les vacances, j’ai rendu visite à mon instituteur du CM2. Il avait quarante ans quand j’en avais dix. Il en a quatre vingt aujourd’hui. Par la magie d’un site sur internet je l’ai retrouvé au bout de quarante ans. J’avais en tête un homme génial, passionné par son métier, et l’ambiance dans sa classe était tout simplement fantastique. Il me semblait géant, travaillait en costume, portait une cravate, il en imposait. Je le respectais beaucoup, le craignais un peu, et avec lui j’adorais l’école.
J’ai rencontré un retraité péchu, bon vivant, souriant, en débardeur. Débordant de projets, curieux des autres, ses anciens élèves ou collègues, mais aussi les autres en général, l’actualité, le monde et sa marche endiablée. Il m’a parlé des enfants, de l’enseignement en France, à l’étranger, de la pédagogie, de sa pédagogie. Je n’étais plus l’élève craintive et admirative mais lui demeurait un instituteur. Il est encore dans l’enfance et je l’envie un peu pour ça. Il n’a plus d’obligation, n’a pas besoin d’avoir l’air docte, sérieux. Il s’est montré espiègle et taquin. Il était jeune, très jeune.
Si je retiens quelque chose de la rentrée, scolaire s’entend, c’est ce pouvoir de nous maintenir dans une jeunesse de l’esprit, de faire qu’on se rappelle forcément. Ce n’est pas agréable ou facile chaque fois, mais se remémorer des petits bouts de soi, fait toujours avancer.