Le printemps arrive et nous souffle un petit air tiède dans le cou. Les soirées commencent après dix-neuf heures, bien que nous n’ayons pas encore changé d’heure. La nuit prend son temps pour s’installer, le ciel se couvre de moutons orangés juste avant, afin qu’elle puisse s’étirer à son aise. Mes chats roulent dans la poussière du balcon et rentrent tout enfarinés pour apporter à mes tapis un éclat unique et particulier. Dans le jardin d’en face, un cerisier se pare de dentelle blanche comme pour aller à la noce et Totor le chien, tend sa balle aux enfants qui approchent du portail.
Eh bien là tout de suite, j’ai envie d’une petite robe légère, pas très longue, juste au-dessus du genou. De tourner comme les enfants, pour la faire bouffer et que le soleil me picote les jambes. J’ai envie de chanter la «chanson des collines », de tendre les mains, les bras. Je suis Julie Andrews et je me raconte ma Mélodie du bonheur. Les oiseaux, le vent, les ruisseaux, les airs du passé formant une ronde, tout ça me met du rouge aux joues et de petites ailes dans le dos. Chaque année, en cette période, la nature a cet élan formidable, ce renouveau, et je suis au diapason. Un petit morceau de soleil, c’est comme un petit bout de sucre, ça rend la vie moins amère. Dans la foulée, j’entonne avec Mary Poppins, le refrain du petit bout de sucre.
Tout ça pour dire que le printemps me ramène à l’enfance, aux comédies musicales des années soixante, comme si une part de moi était bloquée à cette époque. Pour grandir, pour atteindre l’été, m’émerveiller aux couleurs de l’automne, et supporter l’hiver chaque année, il me faut repartir de là.