Pour commenter le tableau sujet de la quinzaine chez Miletune.
Vermeer, Musée D'Amsterdam
Ce geste-là est quotidien, immuable, solennel. Elle s’exécute naturellement, sans y penser. Elle prépare le repas des maîtres ou celui de ses enfants, peu importe, elle a le sens du devoir, elle aime servir. Le geste est lent, mesuré, méticuleux. Elle ne veut pas perdre une goutte de lait, la nourriture ne doit pas manquer. Son visage est concentré, crispé, ses joues rougies par l’effort, le travail, le bien faire. J’imagine un feu dans la cuisine, qui rend sa peau luisante et chaude. J’imagine une ferme à la campagne, des journées vécues au grand air, que justifient ses formes avantageuses et son visage rond. J’imagine que la besogne ne manque pas, rude, harassante, comme en témoignent les poches sous ses yeux baissés. La vie n’est pas facile, le mobilier est plutôt chiche, les murs sont nus et tristes. Et la fenêtre quadrillée, ouverte sur le monde, dont la lumière illumine cette femme, n’attire même pas son regard. Son monde est riche, intérieur. Son existence n’est pas une prison.
Car elle rayonne. Cela se voit dans son corsage qui attrape les rayons du soleil, dans son tablier bleu chatoyant comme un drap de soie, dans les plis tranquilles de sa jupe, au tomber régulier. Et cette coiffe blanche masquant les cheveux lui confère une allure autant austère que touchée par la grâce.