Un début de soirée de juin quand la saison hésite. Le jour se déleste de la chaleur comme un écolier de sa besace. Il est impatient, rageur, pressé de se dégourdir les jambes. Libérer ce trop-plein d’énergie longtemps contenu. Il gigote, se cabre et rue dans les géraniums sur le balcon. Qui dodelinent de la tête ainsi que des grands-pères indulgents. Le jour se charge d’humidité et de fraîcheur, il halète et transpire. Le vent s'en mêle, il fait son souk dans mes cheveux et porte à mes oreilles des rires de jeunes filles dans la rue. Il sème des pollens comme une farce, pour le plaisir de m’entendre éternuer. Un nuage moutonne comme on fronce le sourcil. C’est que tous deux exagèrent, turbulents, dissipés. Je réprime un frisson. Le vent gagne, il est plus fort que le jour. Qui, s'il se se voyait décliner, lutterait pour jouer au grand, et afficherait un dynamisme de bravade.
Une odeur de soupe et de friture lui chatouille le nez, quelqu’un dépose une couverture sur ses épaules. Avec des étoiles cousues dedans. Sur l’asphalte les voitures allument leurs veilleuses afin de vérifier… S’est-il endormi ? Il sursaute, son sommeil est paradoxal. Le jour rêve. Il porte une écharpe rouge autour du cou. Elle disparaît à l’horizon.
Le jour va grandir, et sa vigueur avec lui. Il imposera des heures moites, des envies d’orangeade et de bière glacée, régnera sur des cœurs légers. Il embrasera les soirées de juillet et août, étouffant de sa fournaise les nuits d’une saison enfin installée.