Le casse tête cette semaine chez Lajemy est: le petit coin.
Un beau petit coin de France. C’est ainsi qu’Haakon et Monica parlent de leur séjour à Paris. Dans leurs yeux bleus une lueur brille, de cet éclat particulier des pays nordiques. Une poussière douce, enveloppante, qui vient de Stokholm, cette ville posée sur l’eau. Haakon et Monica ont la cinquantaine, ils sont ronds et blonds tous les deux. Haakon est un militaire gradé détaché à Paris pour un an. Son gouvernement lui a octroyé un appartement douillet rue de Rivoli, tout près de la Concorde. Grâce à lui, j’ai pu entrer dans l’un de ces immeubles derrière les arcades. Comme endormi, retranché des touristes et des badauds. Ce soir là, j’ai aperçu Marc Lavoine, sortant d’un taxi, juste devant la porte. Et de le voir devant moi, amorçait la magie, le petit plus, le show. Ce côté irréel, un lourd portail, une cour gigantesque, une cage d’escalier majuscule, des tapis rouges sans fin. Un ascenseur qui se déplie avec un bruit solennel aux étages. Et l’appartement meublé de cent mètres carrés mis gracieusement à la disposition du couple, est un petit bijou. Alliant modernité et style, canapé blanc et séjour Louis quinze, cuisine équipée tout confort. Et ce lit immense dans la chambre, une incitation au voyage, à l’Odyssée, la tentation d’Ulysse, le coup de foudre de Nausicaa. Monica est aux anges, elle secoue ses boucles blondes, les fossettes font des petits cratères dans l’arrondi de ses joues.
Haakon et Monica ne sont pas mariés et n’ont pas d’enfant. Et la Suède est un pays bienveillant pour ses ressortissants. Monica est infirmière à Stokholm. Elle a pu suivre Haakon à Paris en conservant son salaire. Quand elle reviendra, elle retrouvera son poste sans problème. Alors elle profite, pendant que Haakon plastronne du côté de l’Ecole militaire, elle visite Paris, à pied. Le métro n’a plus de secret pour elle. Les fins de semaine, le couple parcourt le pays en train. Cette année est une parenthèse, un petit coin de bonheur dans leurs têtes. En ce moment ils se grisent de l’air vif de la capitale, des lumières de Noël. Ils dégustent, amusés, nos saumons importés de Norvège, sabrent le champagne et se gavent de foie gras. La vie est belle, cela dure un an. Jusqu’à la prochaine affectation de Haakon, ailleurs en Europe, une autre capitale. Un autre petit coin.