Texte publié chez Miletune d'après la photo-sujet de la semaine
Le flacon, c’est le flacon que j’ai d’abord choisi, pour ses facettes et son ventre rebondi. Celui-là porte la couronne comme un prince. Le verre fait chanter des reflets mordorés, happe les nuances. Le corps est voluptueux, la base fine. Posté sur ma coiffeuse, tout l’hiver, il m’invite et je m’exécute. Un nuage vaporeux, à peine perceptible, comme un léger brouillard pénétrant les pores de la peau. Mais ce n’est pas une fragrance ordinaire.
L’époque est ce qu’il m’a fallu définir ensuite. Quel mois, quel jour, quel moment? Quelle seconde exactement ? Quand recueillir le précieux parfum, constitué de pollens et d’arômes fleuris, de sève et d’herbe coupée, de l’odeur des pierres chaudes, des murs pétris de soleil. Comment harmoniser, séduire, définir une note de tête. Envoûter, inciter à fermer les yeux, débusquant les souvenirs, le passé, l’enfance, au cours d’une séance hypnotique.
Pour la couleur, le choix fut facile. J’avais à emprisonner ce qui se dérobe comme les faces d’un kaléidoscope. A contenir et restituer, graduellement, les impressions, les émotions. L’ambre est la couleur des bijoux d’antan, de l’exotisme et de l’Orient, des peaux gorgées de soleil, des boissons fraîches et maltées, de la lune les nuits d’été. L’ambre était une évidence.
Car, aux instants les plus ternes, les plus glacés de l’hiver, il est ma force, il est ma drogue. Je m’imbibe jusqu’à l’ivresse de l’éther, des voiles d’un Printemps dont j’ai fait la capture aux heures les plus sensibles de la saison.