Lorsque je vais au cinéma depuis deux mois exactement, je n’ai plus de bus à prendre ou de métro, je reste dans mon quartier. Car on a construit ce cinéma Etoile, au drôle de e à l’envers, à quinze minutes à peine de la maison, à pied. C’est mon cinéma de quartier, celui de ma première séance. Il sent bon le velours rouge et les fauteuils neufs, les escalators ronronnent, les salles sont spacieuses, la technologie à la pointe du progrès. On toise Paris à chaque étage et on le nargue au tout dernier, les baies vitrées, immenses donnent le sentiment d’embrasser la ville et la banlieue proche, de plonger en elles. C’est une ascension, une envolée, la quête d’un firmament. Une invitation au rêve, une échappatoire, l’Eden. L’étoile, le ciel et bien sûr la salle obscure au terme du voyage.
J’aime beaucoup cette conception moderne du septième art, une ouverture, une ascension juste avant de s’enfermer vers ailleurs et ses contes filmés. Je garde tout de même un peu la nostalgie des salles de quartiers telle que les chantait Eddy Mitchell, où la plongée dans un monde inventé se faisait sitôt franchie la caisse. Une rupture brutale, une sorte de capture de l’esprit, d’envoûtement. Le tout entretenu par une ouvreuse au sourire doux, accueillant. Mais tout change. Alors l’ouvreuse s’est transformée en une hôtesse veillant à ce que nous quittions la salle après le film, aussi sérieuse et zélée que le gardien des clefs du Paradis. Car aller au cinéma Etoile, Porte des Lilas à Paris, c’est un peu rencontrer Dieu.