Renée qui vit au Sénégal m’a donné l’envie de situer mon 25 décembre sous les tropiques. Imaginez la scène au détour d’une route dans la campagne martiniquaise. Le soleil est de plomb, la nature luxuriante, colorée, et l’église se niche au milieu comme un chat sous une couverture de laine. Protégée, matelassée offerte au vent des alizées, mollement caressée, elle ronronne. Son style est colonial, des contrastes, de l’éclat, elle a la blancheur d’une demoiselle poudrée. Elle joue avec les palmiers et s’offre même le luxe d’une collerette rose, d’un boa déployé à ses pieds. Sa porte est grande ouverte comme si la campagne endormie l’avait contaminée, elle baille. L’air est sec, brûlant, le moindre souffle, la moindre brindille écrasée produit un vacarme infernal. Et l’instant qui vient est un petit paradis à lui seul. Cela commence comme un gazouillis d’enfant qui va crescendo, on dirait que les arbres chantonnent. Mais ça vient de l’église, de la vie à l’intérieur, de la foi. Et quand la chorale entonne « Douce nuit » avec toute la fougue des îles, un frisson électrique parcourt l’asphalte.
Mes photos ont été prises un quinze août en réalité, et la magie des chants d’église, échappés par la porte grande ouverte, fut particulièrement saisissante. Il n’était pas difficile d’imaginer la même scène à Noël.