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27 janvier 2014 1 27 /01 /janvier /2014 08:00

En suivant la consigne du défi 115, chez CETOTOMATIX,  à partir d’un court roman de Jérémie Guez : « Paris la nuit », j’ai extrait les mots suivants :

Lequel/une/ viennent/ toujours/ gars/ à /air/ prouve/ Paris /remerciements

A placer dans un texte de mon invention.

 

C’est un petit GARS A l’allure démodée qui hante le PARIS de Montmartre et des touristes. Il se promène le soir, la casquette  vissée de travers sur la tête, un foulard rouge autour du cou. Il a l’œil vif et la démarche chaloupée de ceux dont la vie se construit au hasard des rencontres. Car il avance lentement et pas TOUJOURS  droit. Il sait qu’on le croit éméché, on suppose que  son cerveau  est embrumé. Il vit dans le Paris des années 50, fredonne le « gamin » de Mick Micheyl, ses héros ont le visage de Gabin ou de Lino. Dans sa faune nocturne, dans son Pigalle, de petites pépées michetonnent pour le compte de caïds qui carburent au whisky.  Il se crée un film dans LEQUEL il évolue en vedette et règle ses comptes avec le milieu.  En réalité il se contorsionne sur  la scène d’un cabaret de pacotille.

 

histoire-casquette.jpg

 

Il n’a rien à PROUVER,  on le laisse tranquille. Trop léger pour la boxe, trop frêle pour fourguer de  la dope, un gun dans la poche de son jean, trop gentil pour castagner les filles qui mouftent, on lui fiche la paix comme à ces étrangers au sourire « nice » qui vont et VIENNENT, s’encanaillent au Moulin Rouge ou préfèrent les beaux gosses dénudés des Folies Pigalle. Il sifflote, le nez dans le caniveau, Gavroche déconnecté, au rire tonitruant. Quand Ali et le Gang  du 9 3 à Aubervilliers,  déboulent dans  le XVIIIème le samedi, ils se moquent de sa trogne anachronique. Avec son AIR efféminé, et sa mèche décolorée, il affole les brésiliennes sous hormones qui arpentent la place Clichy. Il attend son heure, espère la gloire. Ah, faire la UNE des journaux! Il souhaite écrire  un livre qui parle d’aujourd’hui avec la gouaille d’hier, usant de dialogues empruntés à Audiard ou copiés sur ceux, très actuels,  de Jérémie Guez, un petit jeune de l’âge de mon fils. Que les époques se mélangent créant un genre nouveau. A la fin de son texte on publiera des REMERCIEMENTS adressés à tous ces gens qu’il frôle le soir, quand le besoin de se perdre se fait sentir.

 

 

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31 juillet 2013 3 31 /07 /juillet /2013 17:38

 

Bled-copie-1.jpg

 

Il avait promis le mariage et la sécurité, était arrivé de Paris en évoquant Tahar Ben Jelloul. Il avait appris à entourlouper ses mots avec du miel comme l’écrivain. Elle aurait dû se méfier. Il arrangeait des phrases comme elle préparait des gâteaux  poisseux et couverts de graines de sésame. Qui tiennent au corps et font grossir. En dix ans, elle était devenue une grosse fille, mariée à un pervers de Paris qui lui avait collé deux enfants pour l’engluer davantage. Elle, la jolie fille du bled aux longs cheveux soyeux.

Elle s’était dit, je quitte un trou et l’ennui qui va avec. A moi la liberté, je serai une dame,  j’aurai un toit et la sécurité sociale. Je n’irai plus chercher l’eau au puits, et je pourrai sortir seule hors de la maison. Pour le voile, je verrai, ce n’est pas un problème. L’important c’est d’exister en dehors du père, auprès d’un homme. Et puis là-bas, les hommes pensent autrement. Elle n’était pas rusée. S’il était venu la chercher au bled, c’était pour la mentalité. Pour l’obéissance, la soumission, la bouche qu’on ferme. Les filles de Paris, on ne peut pas les mater. Elles prennent exemple, elles sont françaises.

Il avait acheté l’appartement, elle n’avait rien eu à dire. Elle avait repris ses études et eu un enfant, une petite fille.  Elle avait un travail maintenant et tous les mois, elle lui donnait le chèque. Il laissait de quoi faire les courses chaque semaine.  Elle n’avait pas à émettre une opinion. Et quand elle s’y risquait malgré tout, c’était comme souffler dans la semoule. Ca dispersait des grains partout, il fallait nettoyer, c’était tout, elle s’offrait le luxe d’un surcroit de travail.  Si encore elle savait tenir son ménage ! Il la trouvait désordonnée, jetait ses chaussures, ses vêtements, les habits de l’enfant. Ca ne devait pas traîner comme ça partout. Sa mère lui donnait raison, oui mon chéri, habibi, tu as une mauvaise femme. Il revendit l’appartement car les charges du syndic devenaient trop lourdes.

Il acheta une maison, sans elle. Sans son avis à elle, sans que ça ait de l’importance. Elle ne comptait pas, elle était là pour la bouffe, le ménage et la baise. Ses parents étant au bled, elle n’avait personne sur qui se reposer. Alors elle fit un deuxième enfant, avec un peu de chance ce serait un garçon. Et peut-être que ça le calmerait. Ce fut un garçon, un beau petit garçon aux traits fins, aux grands yeux noirs. Et qui ne fit pas longtemps la fierté du père : on le diagnostiqua autiste l’année de ses trois ans.

Il la traita de bourrique, pourquoi avait-elle voulu un deuxième enfant ? Ce gosse, il en avait rien à f… Il le laissait crier et quand il l’appelait, papa, papa, il cognait dessus. Il cognait sur tout le monde d’ailleurs. Il se calmait après l’amour qu’il faisait, mal, car il faisait mal. C’était brutal, bestial, trivial. Après il s’endormait. Dans ces moments, on soufflait un peu, on avait la paix. Quand il partait en vacances, il emmenait la petite avec lui, au bord de la mer. Elle apprenait le bruit des vagues mais pas les éclats de rire. Elle apprenait le sable mouillé avec les pieds. Elle n’avait ni pelle, ni seau, ne construisait pas de château. Mais on avait la paix.

Elle proposa de divorcer à l’amiable. Il aurait fallu partager l’argent de la maison. Il entreprit des démarches, en douce, au bled où il ne possédait rien. Et mit la maison en vente. Elle ne le sut qu’au moment de la signature de l’acte.  Elle serait à la rue avec ses enfants, et alors ? Elle prit un avocat qui lui recommanda de ne pas signer. Les coups redoublèrent sur elle et sur la petite. Mais elle ne céda pas. Au point où elle en était, elle s’en fichait qu’on voit les bleus, les bosses. Pour la petite, elle fit constater les brutalités au commissariat. Ce fut long et pénible. Il y eut des pleurs, l’intervention des cousins, les témoignages des amis. La mairie lui obtint un logement. Et puis un jour ce fut terminé. Elle sortit du tunnel de l’enfer. La lumière au bout avait quelque chose de doux, tiède et liquide. Elle éprouva l’envie de se rouler dedans et de fermer les yeux. Elle avait du temps, des jours à venir, des jours avenir. Elle voulut comprendre et acheta « L’enfant de sable » et  « La nuit sacrée » de Tahar ben Jelloul. Ca parlait d’elle, de sa souffrance ; cet homme-là, avec son français si pur, avait tout deviné. Il était  différent de l’époux de France. Ses phrases avaient des mots brûlants qui parlaient vrai. C’était du miel cristallisé qui n’enrobait pas.  Il donnait des clés, il ouvrait des portes. De quoi reprendre sa vie en mains.

 

 

 

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24 juillet 2013 3 24 /07 /juillet /2013 20:35

poker.jpg

 

Pour Michel sur le site de E-criture, un texte avec pour incipit, l'interrogation suivante:

Se peut-il que ce soit mon rêve qui continue ?

Je ne m’attendais pas à le revoir et le temps avait glissé sur mes projets. J’avais enterré mon rêve d’avenir à ses côtés,  et découvert la vie. Mon parcours avait été lisse, de ceux qu’on bâtit sans se poser de questions, avec le sentiment d’accomplir ce qui tient à cœur, et donne à l’existence sa saveur. Mais je savais au fond, qu’il ne se passait rien. Rien ne vibrait, ne résonnait, ne me comblait réellement.

Ce fut un déclic, comme le pops d’un bouchon de champagne. Assister au remariage de ma meilleure amie semblait une promesse, quelque chose de nouveau était en marche. Comme si le passé allait soulever les barrières de l’ennui. Je déteste les mariages, trop de préparation, d’organisation, de monde à saluer. Trop de rêves à matérialiser. Mon amie rayonnait, elle virevoltait, consciente de son charme et de sa sensualité. Elle était heureuse, inutile d’afficher jeunesse, romantisme ou ingénuité. Elle aimait la fête et les invités  étaient venus pour s’amuser, avant tout. Son bonheur me faisait plaisir mais ne réussissait pas à me contaminer. Je n’étais pas vraiment avec elle. De légers frissons, agaçants comme les pattes d’une mouche me parcouraient  la peau. Car assis à trois rangs de moi, à la mairie, il y avait cet homme, fixant ma nuque. Je savais que c’était lui, surgi du passé comme si  cela faisait partie du protocole,  du déroulement implacable de la cérémonie. Pourtant, sa  présence avait quelque chose d’incongru ce jour, précisément. Je n’osais pas prononcer son prénom, même tout bas. Je m’étais retournée furtivement, avais  retrouvé cet air buté, ce regard clair, tour à tour fuyant et lancé dans ma direction, tel un glaive. Il avait souri, pas à moi, mais au vide. Puis il était sorti, alors que les flashes crépitaient sur les signatures des époux.

Il attendait dehors, sous la pluie, que déboulent chapeaux et costumes. Il avait tombé la cravate, comme on tombe un masque. Le vent soulevait ses cheveux qui commençaient à grisonner. Les traits de son visage étaient apaisés. Comme au poker  quand la partie touche à sa fin, il s’était découvert. Je réalisais que nous jouions un jeu tous les trois, lui, mon amie et moi. Il restait à abattre quelques cartes, à désigner un vainqueur. Tandis que je l’observais, interdite et perdue, la mariée s’avança vers moi, délaissant son époux un instant. De petites lucioles allumaient son regard, ses joues  étaient transparentes, finement rosies. Elle plaqua sa voix chaude et mouillée sur nous, comme un baiser :

-          Je savais que je ne m’étais pas trompée. Quand j’ai compris Olivier, j’ai préféré que nous divorcions et tu n’as pas vraiment discuté. Aujourd’hui je vous ai invités sans vous prévenir, l’un comme l’autre.  Sally et toi, ensemble, c’est ce qui peut arriver de mieux, non ?

Je ne pense pas que mon rêve continue, cela semble trop simple. Il a reparu furtivement puis il s’est arrêté. Je ne suis plus dans le rêve, mon existence a retrouvé de l’arôme et du goût. Ce n’est pas parfait, c’est beaucoup mieux que ça.

 

 

 

 

 

 

 

 

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13 juillet 2013 6 13 /07 /juillet /2013 10:00

Consigne de Michel, sur le site de E-criture

Le principe de cet exercice, connu aussi sous le nom de logorallye, est plutôt simple : utiliser dans un texte que vous écrirez pour l'occasion (quel qu'en soit le genre littéraire) l'ensemble (ou une partie, comme dans le cas présent) des mots de la liste qui vous est proposée.

Les verbes peuvent être conjugués, vous pouvez jouer avec singulier / pluriel, masculin / féminin, et si possible les mots doivent être bien mis en évidence dans votre texte quand vous le publierez (en gras idéalement, ou soulignés)

La liste qui vous est proposée est la suivante :

 

Décence, grille-pain, chuchoter, doigts, ombres,
léthargie, miser, jaune, diantre, scission,

chapeau, boulanger, amers, décor, solution.

Parmi ces 15 mots, il vous est demandé d'en utiliser au moins 10 (mais vous pouvez en utiliser plus, même tous pourquoi pas ^^) pour nous amener là où vous aurez choisi d'aller. Car le vrai but de cet exercice est bien de réussir à dompter les mots, de rester maître de l'histoire qu'ils vous racontent.

 

 

 Incendie1.jpg

 

Ils n’ont pas eu la DECENCE d’attendre que juillet soit à la fête. Ils souhaitaient que ça pétille bien plus tôt,  que ça pétarade. Cela avait commencé dès mai, comme si leur objectif avait été de  réveiller  le mois de la LETHARGIE dans laquelle ce long hiver l’avait plongé. Comme pour planter par avance le DECOR d’une saison chaude,  aux nuits de fournaise,  aussi embrasées et parfumées que le four d’un BOULANGER. Tels  des magiciens ôtant leur CHAPEAU pour un effet de surprise, hier soir, ils ont mis le feu à la rue. L'acharnement a payé.

Se déplaçant en bandes joyeuses, arpentant les trottoirs, ils ont jeté quelques pétards ça et là, comme des OMBRES  rôdant au bas des immeubles. DIANTRE me direz-vous, il faut bien que jeunesse se passe ! En cette période estivale, tout le monde ne se dore pas au soleil, au bord de la mer, en caressant le sable chaud du bout des DOIGTS. Certains ont trouvé la SOLUTION, de quoi faire brûler des feux de joie et oublier d’AMERS destins, les yeux captivés par la danse lascive des flammes CHUCHOTANT sur le bitume, par cet or JAUNE jaillissant du claquement sou.rd de la poudre consumée.  Ils regardaient flamber les voitures comme on observe les tranches roussies oubliées dans le GRILLE-PAIN, d’un air bovin, impuissant.  Et subjugué.

Je ne MISERAI  pas sur le bonheur des pompiers appelés à étouffer l’embrasement de cités, si promptes à faire part de leurs SCISSIONS et de leurs frustrations aux yeux du pays.

 

Incendie2

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24 juin 2013 1 24 /06 /juin /2013 08:00

Défi 105 chez Brûno, divagation à partir  d'un tableau de Balthus:

 

ob_bbd3e1_balthus-le-peintre-et-son-modele-1980-1981-huile-.jpg

 

Je peux recommencer à travailler mes cours, ouf ça y est. Elle a compris. Jusqu’ici, je m’agenouillais et m’accoudais à cette chaise, je fermais les yeux en priant le Seigneur qu’elle réagisse et sorte de sa torpeur. Elle se postait devant la fenêtre et regardait courir la route comme on regarde passer les trains, en spectatrice de sa propre vie. Les bras raides le long du corps, le souffle court, immobile, elle écoutait le temps filant dans ses veines. Elle tressaillait parfois, quand les souvenirs devenaient chagrins et la submergeaient. Et se reprenait bien vite, devinait que je m’agitais dans son dos,  l’onde de sa détresse avait dépassé la mienne, en se propageant. Dans la maison vide, nos souffles s’entrechoquaient. Ces deux chaises et la table exceptées, nul mobilier ou bibelot, nulle étoffe n’atténuait la douleur. Elle nous emportait toutes deux au cœur de la tempête dans ce néant qui arrache et soulève les cœurs. Elle persifflait, elle scandait : il est parti. L’homme  qui vous tenait debout, et faisait la vie douce et bonne.  Vous avez perdu, elle, un amant et toi, ton père.

Aujourd’hui elle a sorti l’escabeau, et tiré le rideau d’un geste nerveux. Elle  regarde la route comme le ferait un pilote de course avant de sauter dans son bolide : avec gourmandise ; elle a un foulard dans les cheveux en guise de casque. Elle soupire. Un râle long, puissant se muant en un rugissement provenant des entrailles. Une délivrance, je le perçois ainsi. Elle me tourne  le dos mais sa nuque n’est pas raide et son bras accroché à la toile ne tremble pas. Les murs, on va s’attaquer aux murs, c’est ce qu’elle a dit. Du blanc partout, plutôt que ce jaune moutarde. On va racheter des meubles, une ligne fluide, moderne, des couleurs claires.

Je peux recommencer de vivre mes folies d’adolescente, de m’offrir de l’insouciance pour un temps. Maman va mieux, ses yeux pétillent et les miens aussi. Papa n’est plus, il est en nous, il rayonne, pour toujours.

 

 

 

 

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10 juin 2013 1 10 /06 /juin /2013 08:00

Défi 104 proposé par Eglantine : La basse-cour est en colère, tous les matins le coq la réveille aux aurores. Imaginez la révolte des animaux de la ferme, en vers ou en prose, de la façon qu’il vous sied le mieux, poème, historiette, dialogue …vous pouvez même convier le voisin qui aimerait lui aussi faire parfois la grasse matinée !

 coq.jpg

 

Pendant quelques jours, nous a-t-on assuré, vous devrez parader devant des citadins, à la  grande ville, dans le petit parc. Il y aura des enclos, un pour le coq ses poules et quelques canards, l’autre pour les cochons, un autre encore pour les chèvres et les moutons. On placera deux ânes dans le dernier. Alors faites comme si. Ebrouez-vous, caquetez, tâchez de braire avec modestie, remuez votre petit derrière au goût de jambon, et vous les vaches que j’ai oublié, vous devrez meugler gentiment, avec un accent qui sent bon l’herbe des prés.

 

Ce seront  des vacances pour vous, un peu comme si vous alliez au musée. Derrière les barrières, il y aura de drôles d’animaux turbulents. Des mains se tendront, des mômes piailleront, d’autres pleureront, d’autres encore se sauveront effrayés. Des parents voudront à toutes forces vous photographier. On tentera de vous nourrir avec de la barbe à papa, car évidemment il y aura des stands tenus par les humains pour les humains. Désolé Naf Naf si ça sent la saucisse, mais les humains ne sont pas toujours délicats. Vous aurez de la chance, le temps sera plutôt frais, ça découragera certains. Sachez les caqueteuses qu’on vous demandera des œufs. Alors je t’en supplie Gallo motive tes demoiselles, pas comme  d’habitude en réveillant la maisonnée dès cinq heures du matin. A la ville on se lève plus tard et les œufs doivent être pondus pour le petit déjeuner. Tu dois montrer que tu es le mâle, hocher la crête et affûter tes ergots mais tu peux quand même diminuer tes trémolos et en ralentir le rythme. A la ville on se retient, on mesure ses actes. Je sais que tu es le chef, le ténor, le Caruso  de la basse-cour, pourtant tu ne vas pas là-bas uniquement pour te faire entendre mais surtout pour te faire connaître.

 

En fin de compte que qu’on attend de nous, est qu’on soit beau, qu’on l’ouvre un peu et qu’on se taise beaucoup. On nous demandera de mimer la campagne, et de nous ébrouer dans la paille. Il y aura même un fermier déguisé qui fera semblant de se plaindre du vacarme. Eh bien Gallo, pour une fois en ce qui nous concerne, il y a contre-ordre. Et nous t’accompagneront dignement. A cinq heures d’ordinaire on n’entend que ton chant strident et malvenu de goujat mal remplumé, mais ces jours-là tu ne seras pas seul. Ca va cancaner, braire, grogner, glousser, glouglouter, piailler, bêler, chevroter un maximum et ils sauront à la ville, qu’on n’est pas des animaux, à moitié. Ils sauront que nous nous unissons quand notre honneur est en jeu.

 

 

 

 

 

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29 avril 2013 1 29 /04 /avril /2013 08:00

Remonter le temps, tel est le défi 101 chez Hauteclaire.

 

café

 Edgar Degas: Femmes à la terrasse d'un café le soir

 

J’ai toujours su que j’en venais, qu’un jour j’y retournerais. Alors quand on m’a offert d’aller faire un tour chez Tortoni, j’ai cru à un canular. D’abord cela m’a vexée car   les demi-mondaines y élisent domicile, mais  j’avais envie de rencontrer le tout Paris. Et  la machine m’a invitée. Le 22 boulevard des Italiens est le lieu où il faut être. Pas le matin car on s’y rend pour déjeuner, c’est tout. Mais le soir, il y a foule dans les petits salons, on y sert des rafraichissements dans une odeur de tabac, de gaz et de fumée.  C'est une halte obligée au sortir de 'Opéra. J’adore y rencontrer des étudiants, des dandys, des gens de lettres, des politiques. Quoiqu’en cette année 1843, mon ami Flaubert est bien trop pauvre pour s'y pavaner.  Et de toutes manières il s’en moque, écrire est son seul plaisir. Quant à Balzac, ses goûts de luxe et son attrait pour les grandes dames lui font mener cette vie de boulevard qu’on attribue aux dandys, il me plait observer sa bedaine rebondie que son génie fait oublier. Eugène Sue passe aussi chez Tortoni, il discute cheval avec Orsay et je les écoute en dégustant des glaces. Surtout qu’en ce moment se prépare le derby de Chantilly où l’on peut admirer ces dames et leurs belles toilettes. La mode anglaise influence tant nos grands hommes ! Et j'en vois tellement défiler que j'en ai le tournis, Dumas, Barbey d'Aurevilly, Hugo, George Sand. J’ai aussi entendu parler des bains chinois au 27, c’est un hammam de luxe, non mais je rêve. On parle déjà de bains de vapeur, aromatisés, de massages, et toute la déco est de style chinois ! Comme tout cela est délicieusement tendance !

 Evidemment,  les dandys refusent de fréquenter les boursiers et les hommes d’affaire qui sont d'un autre monde selon eux. S’ils savaient que dans le prochain siècle ceux-ci les détrôneront.

Moi j’adore me trouver là en famille avec mon époux et mes enfants, j’arbore des robes de taffetas, un magnifique chapeau, des gants.  Et je pense au choc qu’ont dû éprouver les Rémusat ce 28 juillet 1835, quand un attentat fut perpétré non loin de là sur le passage du  cortège du roi Louis Philippe qui se rendait à la Bastille.

Et la machine me ramène aujourd’hui chez moi. Loin des luxes d’autrefois et de la vie trépidante du  boulevard de l'époque. Pourtant dans les cafés de Paris, boulevard des Italiens et des Capucines, flotte encore un air du dix-neuvième. La touche française, la distinction, une certaine forme de légèreté qui donne envie d’écrire n’importe quoi.

 

 

 

 

 

 

 

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20 mars 2013 3 20 /03 /mars /2013 10:00

Le casse-tête cette semaine chez Sherry est : eau.

 

 Photo-279.jpg

 

Ce fut ma première vision du lac, une étoffe, du velours  miroitant au soleil de juillet. Une superposition de reflets bercés par un vent tiède, un éventail de nuances bleutées serpentant vers l’autre rive. Je m’y vautrais, m’y noyais, j’étais une amoureuse banale et trahie. J’avais le vertige et contemplais un autre lac, limpide et clair. Et faux. J’avais été une midinette. Hier encore, l’eau de tes prunelles alimentait ma soif d’amour. J’aurais pu rester  des heures, perchée dans les hauteurs, le regard aimanté et humide. Toute volonté éteinte. Ma peine s’atténuait, je n’étais plus que cette chose attirée par l’eau.

 

J’étais loin de la berge et du clapotis des vaguelettes, il y avait foule autour de moi. Alors j’avais ignoré l’appel des profondeurs, ce trou noir que l’on devine et qui tournoie au centre de l’étendue glacée. Je n’étais pas assez folle, assez malheureuse ou forte. Je n’aurais pu remplir mes poches de cailloux et avancer, déterminée telle une Virginia Woolf en proie au mal de vivre. J’avais mis de la distance, de fines branches balançaient devant moi, tels des cils. Comme pour me fermer les yeux, un instant, m’inciter à l’oubli. A ne plus voir ensuite que l’eau paisible et dormante, bordant les rives d’un été italien propice aux belles histoires d’amour.

 

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18 février 2013 1 18 /02 /février /2013 08:00

Défi 96 cette semaine chez Lilou à la barre des CROQUEURS DE MOTS : Rupture

 

 

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 A toi que j’aime,

Quand tu es partie, j’ai su que je ne te courrais pas après. Que ma fierté ne le permettrait pas. Sagan n’a-t-elle pas dit : les êtres orgueilleux ne savent pas aimer. Je n’ai peut-être pas su, ou voulu m’engager, je pense que c’est l’une des raisons de ton départ, mon manque de tendresse durant ces moments légers et tendres en ta compagnie. Je ne peux pas expliquer et ne souhaite pas le faire, cela fait partie de mon caractère, cette raideur, je ne connais pas l’insouciance. Je tâcherais de m’amender à l’avenir. Mais pour toi, c’est trop tard, je le réalise.

Je ne tiens pas à m’accrocher, je trouve cela ridicule, même si l’on affirme que le ridicule ne tue pas. Que l’humiliation est l’un des versants de l’amour. Je n’ai pas de crampons ni de piolet, je n’escaladerai pas cette montagne. Et je me connais parfaitement. A trop me prosterner devant toi, je réussirais à te reconquérir qui sait, mais jusqu’à quand ? Quelle serait la date de ton prochain départ ? Je devrais vivre un semblant de bonheur avec ce poids sur le cœur. Je te détesterais en fin de compte, je te haïrais.  Et je ne me supporterais plus. Je me lèverais un jour et aurais envie de gifler ce visage  qui me fixe dans la glace.

Aussi, ne manifeste aucun étonnement, aucune surprise devant mon manque de réaction et mon mutisme. Je t’aime encore trop et j’ai mal, je ne veux plus affronter  ce qui reste des jours anciens. J’ai planqué toutes les photos qui me les rappellent. Je les détruirai si j’ai un peu de courage.

Alors permets que je t’embrasse une dernière fois, que je t’étreigne et respire ton parfum. Et que je te tourne le dos, comme à tout ce qui me rappelle nos folles équipées et nos dérives.

                               

  Adieu mon amour, adieu  à toi  période bénie de ma vie, adieu Ma Jeunesse.

 

 

 

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4 février 2013 1 04 /02 /février /2013 08:00

Dans son défi  95 Lénaïg nous propose :

 

 Un texte-sandwich ! Encadrons-nous de deux citations extraites d'un roman pour imaginer une histoire entre les deux !

Commençons notre page par ceci : "[...] La nuit avait des yeux, le vent de longues oreilles et nul jamais ne se rassasiait d'autrui." Et terminons-la par cela :"[...] - Tout dépend du vent, il y en a qui vous font tomber, et d'autres qui raffermissent vos attaches et vous fortifient." Je préciserai à la fin de la semaine le titre et l'auteur du roman.

 

valse

 

La nuit avait des yeux, le vent de longues oreilles et nul ne se rassasiait d’autrui. Elle ne pouvait que tomber amoureuse. Lancé dans la foule comme un tronc mort balloté par les flots, lui dérivait. Détaché,  il faisait mine d’ignorer le groupe, en sirotant un punch, les yeux baissés. C’était de la stratégie, elle avait déjà croisé de ces tombeurs. La première fois, le type l’avait prise au piège au cours d’une autre  "soirée cocktails", en lui tendant un mini éclair à la pistache.

Celui-là n’esquissait pas un geste, il laissait venir à lui les "grandes cruches". C’était la nuit, elle avait chaud et s’installa sur la terrasse afin de converser avec le vent. Elle savait qu’il la suivrait, piqué de n’avoir pas réussi à l’aimanter.

Il s’accouda au balconnet, loin d’elle. Il espérait encore, avait confiance en lui. Cette manière de croiser les jambes et de tirer sur sa cigarette. De passer une main dans ses cheveux frisés. Il la provoquait, plaçant son corps  svelte dans une flaque de lumière posée par la lune sur la dalle. Et tandis que d’autres sortaient comme eux, attirés par la fraîcheur, puis retournaient bruyamment dans  salle, ils ne disaient mot. Ne bougeaient pas. Ils savaient l’un comme l’autre, que leurs vies se tamponneraient. Ce serait foudroyant, passionné et bref. Peut-être pas. Mais par la suite, l’existence aurait une tout autre saveur.

 

Il l’agaçait à ne pas céder, à ne pas tenter de lui faire la cour. Elle l’excitait, cette froideur, cette carapace, ce dédain ! Quelle sensualité dans le long serpent déployé de ses cheveux ! Il serra le poing, les mâchoires, elle esquissa un sourire. Ils n’échangeaient pas un regard mais se devinaient. Des voix leur parvenaient du salon, assourdies. L’orchestre entonna une valse qui les pétrifia.

Comme si quelqu’un avait sifflé le début d’un match, leur enjoignant de cogner, de faire mal. Comme si le monde autour d’eux n’attendait qu’un divertissement, à leurs dépens. Comme si tous ces gens se prenaient pour le vent. Ils se laissèrent porter et se rapprochèrent.  Puis il la saisit par la taille et  l’entraîna à l’intérieur parmi les danseurs. Grisés, ivres, ils ne résistaient plus. Ils avaient compris, ils avaient admis.Tout dépend du vent, il y en a qui vous font tomber et d’autres qui raffermissent vos attaches et vous fortifient.

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