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29 juin 2012 5 29 /06 /juin /2012 10:00

 

Elle avait saisi son sac ce vendredi dix-huit novembre. Je lui avais emboîté le pas, je désirais tellement la convaincre de rester, ou de revenir, ou de m’appeler. Me précipitant à sa suite, j’avais coincé mon pied  dans la porte de l’ascenseur. Prendre l’ascenseur alors que j’habitais au premier ! Moi, je préférais les escaliers.  Pour elle c’était une habitude, elle n’y pensait pas. Elle  avait jeté son sac à terre, s’était tiré les cheveux à se brider les yeux. Elle s’était massé les tempes,  avait sifflé entre ses dents : « Je ne veux plus te voir, tu comprends, je n’en peux plus. »

dispute.jpg

 

Elle souhaitait gagner le rez-de-chaussée mais j’avais le pouce sur le bouton d’ouverture de la porte et mon bras l’empêchait de sortir. L’ascenseur s’ouvrait, se refermait. Nous tournions en cage, comme  une mangouste et un serpent. Elle était le trigonocéphale, elle ondulait, mes dents ne lui faisaient pas peur. Elle m’inoculait son venin paralysant et mortel. J’avais le museau tendu, l’œil rond, je subissais. Je n’avais pas esquissé un geste pour  me défendre. Son mascara coulait le long de son nez ainsi que sur mes mains levées vers elle. Elle s’agrippait à moi, me repoussait puis se collait contre les parois de la boîte métallique. Elle piaffait. Ses trépignements se répercutaient le long de la colonne.

« Mais pourquoi, pourquoi… bredouillai-je. 

- Laisse-moi,  Marc, s’il te plaît, laisse-moi… »

Nous avions des rimes pitoyables.

Et ce fut l’obscurité. Elle me donna le dos, elle se mit à pleurer doucement. Ses épaules tressautaient, la boucle de son ceinturon éraflait la peinture de la cage. Nos reniflements marquaient le silence. Nous étions hagards, débraillés, sentions le whisky et la cigarette. Je réprimais un frisson. 

La lumière nous surprit subitement, l’ascenseur descendit tout droit vers les parkings. Nous nous raidîmes comme des coupables à l’énoncé d’un verdict. D’instinct je marchai en titubant  vers ma voiture, elle me suivit sous l’œil inquiet d’un couple qui montait vers les étages. Et je ne sais plus…

 

Un détail me revient à l’esprit. Avant de la courser, j’avais retourné la seule photo que je possédais et qui nous représentait ensemble. Je l’avais retournée contre la tablette du téléphone. Avais-je senti combien cette poursuite était vaine?     

 

 

 

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commentaires

M
Magnifique tisssage des mots ! Cette scène me fait penser à une pièce de théâtre dans laquelle jouait (théâtre amateur) une de nos filles "Un ascenseur pour deux" en te lisant, j'étais aussi au<br /> théâtre. Tes talents me font rêver. bravo et gros bizz
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M
<br /> <br /> Merci Mamie Claude, je suis ravieque ça te plaise.<br /> <br /> <br /> <br />
S
Quand la querelle est violente, il y a encore beaucoup d'amour.<br /> C'est quand l'indifférence arrive que ça commence à craindre ;-)
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M
<br /> <br /> Oh oui, et mes personnages sont venus tout seuls, à force d'entendre mon ascenseur monter et descendre dans l'immeuble, un jour de déménagement. Comme quoi!<br /> <br /> <br /> <br />
É
Ton récit intrigue et donne envie de connaître la suite...
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M
<br /> <br /> ah , ah, il faudrait iventer des réconciliations et des obstacles pour faire un bon roman.. Bise à toi.<br /> <br /> <br /> <br />
C
Les ascenseurs, des lieux intenses au cinéma. Tu as bien recréé cette atmosphère dans ton récit, qui m'a un peu rappelé la séquence de l'ascenseur dans le film de Bergman "L'attente des femmes".
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M
<br /> <br /> Ah, il faut que je vois ce film! Merci Carole pour l'info et à bientôt chez toi.<br /> <br /> <br /> <br />
M
Coucou Mansfield, ah les disputes de couple... on se retrouve bien dans tes mots. Joli ton récit XX
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M
<br /> <br /> Merci Mireille, à bientôt.<br /> <br /> <br /> <br />
L
Bonjour Mansfield. Un bel hommage que tu rends à ... l'ascenseur de ton immeuble ! Superbe scène à la fois intérieure et visuelle, à rajouter aux riches heures de ton ascenseur. Bravo, un beau<br /> dimanche à toi.
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M
<br /> <br /> merci Lénaïg, comme quoi il suffit de peu pour avoir envie de broder, de partir... dans sa tête...<br /> <br /> <br /> <br />
F
Une scène bien décrite , qui arrive dans les couples . Comment s'en remettre ?
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M
<br /> <br /> Moi, je crée, à eux de se débrouiller! J'inventerai peut-être une suite qui sait! Merci de ton passage Fanfan!<br /> <br /> <br /> <br />
C
Bonsoir Mansfield,<br /> Un duel superbement orchestré par ton écriture, avec une émotion qui va s'intensifiant, comme un thriller enveloppant ce couple. Leur danse féroce de colère et de passion mêlées emporte le<br /> lecteur.<br /> Merci beaucoup et un grand bravo!<br /> Bises et excellent week-end!<br /> Cendrine
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M
<br /> <br /> Merci Cendrine, toujours ravie de lire tes commentaires!<br /> <br /> <br /> <br />
M
Les ruptures sont souvent des scènes de théâtre de boulevard, la tu les décrit magnifiquement.
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M
<br /> <br /> Merci Monique, j'avoue que ça m'a bien amusée. A bientôt<br /> <br /> <br /> <br />
L
Aïe ! Aïe ! pas facile la vie de couple !
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M
<br /> <br /> Et ceux-là m'ont été inspirés par l'ascenseur de mon immeuble, comme quoi!<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
N
Pas simple de vivre à deux...<br /> Bonne journée !
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M
<br /> <br /> Tu as raison Nina, et j'ai forcé le trait un peu quand même!<br /> <br /> <br /> <br />
T
Très cinématographique effectivement. Et le destin qui s'en mêle... Bonne journée Mansfield, à bientôt.
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M
<br /> <br /> Merci Thaddée, j'ai effectivement joué sur les détails t la comparaison en me rappelant un combat de mangouste et de serpent vu en Guadeloupe, à bientôt.<br /> <br /> <br /> <br />
J
Bonjour mansfield ! Jolie querelle... je les imagines bien ces deux-là... tu nous en fait un portrait de cinéaste ! Merci...
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M
<br /> <br /> Merci Jill, un beau compliment de la part d'une créatrice de situations parfois loufoques!<br /> <br /> <br /> <br />

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