Je vais oser. Evoquer dans un même texte Monument Valley et le Cap Fréhel dont j’ai parlé la semaine dernière. Je vais oser car les lieux m’impressionnent davantage par leur pouvoir de suggestion que par leur incroyable beauté. Et Monument Valley à la frontière de l’Utah et de l’Arizona, c’est le Far West, les bottes à éperon, les chapeaux des cowboys et leurs foulards.
Quand arrive on a envie de s’asseoir devant un feu de camp, de partager un repas frugal, la main sur le colt, des fois que… les indiens ! On galope à cheval, on chasse au lasso, on envoie des éclaireurs repérer des tepees. On est "Prisonnière du désert", amoureuse d’Eclair, ce grand indien balafré, envoûtée par John Wayne cowboy pur et dur, presqu’insensible.
Quand on arrive on est accueilli par les indiens Navajo du XXIème siècle à bord de jeeps tout terrain, hurlant « Ça roule ma poule ! », pour amuser le français en goguette. On découvre des rochers au nom évocateurs, main gauche, main droite, Snoopy, W. On pique-nique à l’indienne, Hum… On s’isole, parce qu’on a envie de s’asseoir devant un feu de camp… Et ça fonctionne.
Puis on apprend que les Navajo n’ont jamais emprisonné quiconque en Utah, contrairement aux Comanches du Texas. Que la prisonnière à qui c'est arrivé en vrai et qui a inspiré John Ford, est devenue folle car elle n'a jamais pu se réhabituer aux siens une fois délivrée. Monument Valley, le décor était un caprice du réalisateur. De biens d’autres après lui. Tout est faux mais ça sonne bien. Cette vallée ocre, immense, désertique, évocatrice est si belle qu’on entre sans peine… dans le film.