Cet été, rue Saint Maur à Paris dans le XIème arrondissement, l’amour était à mes pieds. Je m'étais arrêtée comme éblouie lorsque je l’avais aperçu. C’était un matin clair dans la ville désertée, à l’heure où passent les camions poubelle, et l’homme dans son costume vert balayait le bitume devant moi. Je le gênais dans son travail et puis ce texte, il le frotte tous les jours à 9h, juste avant sa pose. Il grommelait. Encore les mots d’un illuminé pas très futé qui s’imagine qu’on attrape les filles avec des lettres. Et on dirait que ça marche. Il y en a qui ont du temps à perdre tandis que d'autres soulèvent la poussière avec conviction!
Il m’avait dévisagée un instant, puis s’était éloigné en hochant la tête avec mépris tandis que je photographiais mon pied avec Amour. Je trouve qu’ils vont bien ensemble, mon pied et Amour, comme un petit couple. Amour a une petite barre au milieu du A, du o, et mon pied avait des sangles ce jour-là. Amour a quatre petits orteils au milieu de lui, comme les miens sur le cliché. Nous étions faits pour nous rencontrer même si c’était un drôle d’endroit. Mais Amour ne concerne pas que moi, Amour est aux pieds de chaque basket, de chaque talon aiguille aussi. Amour est partout, il suffit de le ressentir et de s’arrêter, de l'observer. Amour s’écrit naïvement dans toutes les langues, en lettres rondes et appliquées. Amour interpelle et donne des couleurs à la vie. Au trottoir… Hélas, Amour est souvent piétiné….